UN ROI CRUEL Tome 3

Rencontre inattendue

Rencontre inattendue

Helias attendait devant les portes du palais principal, l’arrivée d’Olgan Seyid. L’angoisse qu’il avait éprouvée la veille et le matin même lui vrillait la poitrine, mais en tant que souverain d’un grand pays, il prenait sur lui pour ne rien laisser paraître.

Callen avait tenu à être là, lui aussi, il avait prétexté rester aux côtés de sa future épouse afin de la soutenir lors du départ de sa sœur. C’était compréhensible au vu de la pénibilité par laquelle, la cadette d’Anisha allait passer, elle aussi.

Ce matin-là, le ciel était clair et dégagé, l’été battait son plein et sans le vouloir, Helias se remémora le jour où Anisha fut amenée au palais en tant que prisonnière. S’il ne l’avait pas accueilli en personne, sa curiosité l’avait poussé à l’épier depuis une fenêtre du bâtiment. Surtout que ces hommes qui l’avaient reconnu, lui avaient rapporté qu’il s’agissait de la même fille qu’ils avaient sauvé des mains des esclavagistes, sur le port principal d’Albatra.

La fierté et la ténacité transparaissaient dans chacun des gestes d’Anisha, et étant du genre à respecter le courage sous toutes ses formes, Helias n’avait pu s’empêcher de se sentir intrigué. La femme d’un traître qui se montrait bien plus brave devant l’adversité que son mari, ce n’était pas tous les jours qu’on voyait ça.

Et une fois qu’il avait fait face à Anisha dans la salle du trône, il eut la confirmation de ce qu’il pensait. Malgré la terreur qu’il instillait en cette fille, elle n’avait jamais courbé l’échine devant lui, ni devant personne d’ailleurs. Enfin, pas avant qu’il lui ait laissé entendre qu’il s’en prendrait à son peuple ainsi qu’à sa sœur…

_ Ils sont là, fit Callen en voyant les deux fiacres passer le grand portail de l’entrée officielle.

_ C’est étonnant, releva Helias intrigué, pourquoi l’ambassadeur a-t-il besoin de deux fiacres ?

_ Il s’agit peut-être de son escorte. Il vient tout de même chercher un membre de la famille royale.

À ces mots, le roi se raidit. Qui d’autre que ce Madok pourrait jouer les gardes ? Surtout avec la nouvelle menace qui semblait peser sur Ani.

Il n’eut pas le temps de trop penser la question, que son frère l’enjoignit à sortir pour accueillir la délégation qui était tout près, et sur le passage, il envoya l’un des gardes afin que la princesse soit prévenue de l’arrivée de l’ambassadeur.

_ Essaye de prendre un air moins fermé, mon frère, fit Callen en voyant qu’Helias arborait une expression renfrognée.

_ Crois-moi, c’est le mieux que je puisse faire, alors n’attends rien de plus de ma part.

_ Eh bien, ça promet d’être tendu, continua son cadet en se postant sur le flan des carrosses et en apercevant Madok dans l’un d’entre eux.

_ Il fallait vraiment que cet impertinent vienne ? demanda le souverain comme pour lui-même.

_ Il faut croire qu’il fait partie de la garde qui escortera Anisha, supposa Callen en posant une main compatissante sur l’épaule de son frère. Aller, ça va bien se passer…

_ Majesté, je suis heureux de vous revoir, lança Olgan en sortant en premier du fiacre et en esquissant une révérence.

_ Vous êtes le bienvenu, monsieur l’ambassadeur, répondit Callen tandis que le concerné continuait de fixer le second fiacre. Puis après lui avoir donné un discret coup de coude pour l’obliger à reporter son attention sur Olgan, Anisha n’est pas encore là, mais elle ne saurait tarder…

_ Bonjour, monsieur l’ambassadeur, finit par le saluer le maître des lieux, vous pouvez nous suivre, nous serons mieux à l’intérieur pour attendre la princesse.

_ Majesté, je sais que ce n’était pas prévu, mais je voudrais vous présenter certaines personnes… et aussi vous demander un service, si cela est possible bien sûr…

Helias qui allait tourner les talons pour ouvrir la marche reprit sa place et l’interrogea du regard.

_ Vous pouvez descendre, Madame, lança l’ambassadeur au second fiacre.

Rapidement, Madok ouvrit la porte et descendit. Après avoir esquissé un léger signe de tête à Helias en guise de salutations, il offrit sa main à une personne qui devait être assise à ses côtés.

_ Madame, fit respectueusement le major une fois qu’une jeune femme descendit du fiacre et qu’elle leva la tête vers Helias et Callen.

_ Merci, Madok, dit-elle en esquissant un sourire à l’homme, puis en se tournant vers la voiture, descends Devan, on est arrivé.

À ces mots, un garçon d’une quinzaine d’années descendit à son tour.

_ Majesté, fit Olgan une fois que les deux jeunes gens s’étaient approchés d’eux, laissez-moi vous présenter madame Lavina Omran et le raja Devan…

_ Madame, les salua Helias en tentant de remettre les visages de ces personnes, ou tout au moins leurs noms.

_ Sire, je vous souhaite bien le bonjour, fit la jeune femme même si le petit restait silencieux et un tantinet bougon.

_ Il s’agit en fait de la mère de notre rani, continua Olgan qui savait qu’il allait créer la surprise, et à ses côtés, vous avez son autre fils, qui est aussi le jeune frère d’Anisha…

Ces mots avaient été limpides et ne nécessitaient aucun effort particulier de compréhension, seulement le souverain se sentait dépassé par ce qu’il entendait.

_ Je vous demande pardon ? fit-il en ne détachant plus son regard de cette femme qui paraissait bien jeune pour être la mère de ce garçon, et encore moins celle d’Anisha.

_ Je vous disais, Sire, que vous avez devant vous la parente de la rani…

_ Oui, cela, je l’ai bien compris, le coupa le souverain qui n’avait aucunement besoin qu’on lui répète l’information, mais je pensais qu’elle restait introuvable à ce jour…

_ C’était bien le cas avant que notre jeune major ne prenne les choses en mains, et qu’il ne s’emploie à la rechercher sérieusement.

Le souverain leva la tête vers son rival. Il avait beau ne pas l’apprécier, cet homme restait tout de même un élément plus qu’intéressant.

_ Eh bien Major, je dois vous reconnaître une certaine efficience en plus d’une persévérance sans faille.

_ Ravi de voir que votre jugement sur ma personne évolue, Sire.

_ Majesté, intervint Olgan Seyid, comme je vous l’ai dit un peu plus tôt, j’aimerais vous demander une faveur à titre officieux.

_ Oui bien sûr. Suivez-moi à l’intérieur, nous serons mieux pour converser…