Donnez-moi un héritier !

1308 Mots
Donnez-moi un héritier ! La cour se figea devant les paroles prononcées par le nouveau maître du pays, et Izia qui était debout la seconde d’avant, se laissa choir au sol. Abasourdie. À genoux et le cœur glacé d’effroi, la jeune femme eut de la peine à reprendre son souffle. Sa tête se mit à tourner et alors que le garde qui avait amené l’enfant, s’apprêtait à l’emporter, elle s’y agrippa avec force et désespoir. _ Izia, implora le prince qui ne comprenait pas très bien ce qui se tramait, ni où, on l’emmenait. _ Je vous en prie, non ! Sire, ayez merci, ce n’est qu’un enfant innocent ! _ Peut-être bien, acquiesça Soren aussi stoïque que s’il avait demandé une bagatelle la seconde d’avant, mais c’est aussi le seul obstacle qui me sépare de mes prétentions sur ces terres, madame. _ Vous m’avez demandé de vous épouser pour asseoir votre légitimité, et ce fut fait, sire, alors pourquoi faites-vous cela ? Ce petit n’a rien demandé et dans le futur, il ne demandera rien non plus ! _ Ça, c’est vous qui le dites ! Il est enfant aujourd’hui, mais rien ne me garantira son allégeance demain, quand il sera adulte. Et combien même, il ne participera pas à une quelconque dissidence, certains de vos gens, se montreront prompt à tenter de me défaire pour lui redonner sa place légitime. Ce que disait Soren Daskar était réel, et toute duplicité mise de côté, Izia y avait pensé elle-même. Mais comment intercéder efficacement pour la vie de son frère ? Et surtout que pouvait-elle proposer comme garanties. _ Sire, continua la jeune femme en allant faire face à son époux, tout cela n’est que conjectures ! Si notre peuple est traité correctement et que le pays prospère sous votre règne, personne n’ira contre vous. Je vous l’assure… _ Et comment ?! Comment me garantirez-vous cette obédience dans le temps ? Aux yeux de votre peuple, je suis un roi barbare et je le resterais quoi que je fasse. Je pourrais développer Roan autant que possible, je pourrais m’investir plus que jamais, mais à la première difficulté, les vôtres me renverront à mon statut d’oppresseur, et ils se rebelleront à la moindre occasion. _ Pas si je vous soutiens, Sire. Si je reste à vos côtés, personne ne remettra en cause la validité de notre accord… _ Votre soutien ? Laissez-moi rire… à la moindre occasion, vous serez la première à me planter dans le dos. Emmenez l’enfant, ordonna-t-il à son officier. _ Non, je vous en supplie ! Ne faites pas ça… L’assistance s’était comme extraite de son immobilité, et des suppliques s’élevèrent pour appuyer celles de leur dame. Pour montrer leur humilité devant le souverain et demander sa clémence les nobles présents, se mirent à genoux. Si seulement, Izia n’avait pas consenti qu’Emar profite de la cohue de sa reddition pour quitter le palais. Son ami était non seulement de bon conseil, mais aussi très bon diplomate, s’il avait été présent, il aurait pu tenter de proposer une solution à ce monstre sans cœur. _ Je vous en conjure ! Exilez-le, mais ne le tuez pas ! s’écria la jeune femme acculée. Je consens à ce que vous me sépariez de lui, et que vous l’envoyez au loin, mais par pitié… *** Se conformant à son plan de départ, Soren refusait de se laisser attendrir au sujet de l’enfant. Il avait bien de l’aversion pour ce geste inhumain, mais c’était un passage obligé pour se garantir une certaine paix future. Il était d’extraction royale et il savait mieux que quiconque, comment pouvait tourner les choses s’il se montrait trop clément. Ou trop faible. _ Je vous en conjure, Sire ! Implora son épouse en réduisant leur distance et en lui saisissant le bras. Envoyez-le aussi loin que vous le voudrez, dépossédez-le de tout titre, mais épargnez-le… Le regard embué de larmes et la voix tremblante, Izia tentait de garder un semblant de calme en ne cédant pas à totalement à ses émotions. Un peu plus tôt, Soren avait pu apprécier tout le courage dont cette fille était capable, et à cet instant, sa vulnérabilité le déstabilisa. En donnant un tel ordre, il s’était attendu à ce qu’elle intervienne, qu’elle hurle son désespoir, qu’elle lui reproche son manque de cœur, mais de la voir lutter pour garder un semblant de dignité, lui fit quelque chose. Il était bien loin de la princesse gâtée qu’il imaginait. _ Madame, ressaisissez-vous, je vous prie, lui dit-il alors qu’inconsciemment, elle serrait son bras entre ses mains. Je comprends votre peine et j’y compatis, seulement, je n’ai d’autre choix que celui-là… Sur ces mots, il quitta la salle du trône. _ Sire, je vous en prie ! continua de le supplier son épouse tout en lui emboîtant le pas. Ne me privez pas de mon frère comme vous m’avez privé de mon père ! Ce n’est qu’un petit garçon qui ne cherche qu’à jouer et vivre sa vie d’enfant…s’il vous désobéit par la suite, je vous promets de ne pas prendre sa défense… _ Vous ! Trouvez-moi des appartements libres, ordonna le souverain à l’un des domestiques qui traversait une vaste allée, un plateau dans les mains. _ Bien, Majesté, bredouilla l’homme qui déposa son chargement sur un meuble et le devança pour l’aiguiller. _ Sire, je vous parle ! insista Izia sur un ton qui frôlait l’emportement. Le souverain s’arrêta net et se tourna pour lui faire face. _ Et je vous ai dit tout ce que j’avais à vous dire. Donc, si vous ne voulez pas vous exposer à une facette moins commode de ma personnalité, aller vaquer à vos occupations en silence. _ Je… qu’est-ce que je peux faire pour vous convaincre, implora à nouveau son épouse dont le menton tremblait d’émotion. Vous ne pouvez pas décemment me demander d’accepter une chose aussi injuste ? Avez-vous seulement une conscience ? _ Et la vôtre de conscience ? rétorqua Soren sur un ton de reproche. Elle n’avait pas l’air de trop vous peser, madame, quand des tributs sous formes de femmes et d’enfants, étaient prélevés dans notre nation, par ordre de votre père… _ Je ne comprends pas, bredouilla cette fille de mauvaise foi. De quels tributs parlez-vous ? _ Ne faites pas l’innocente ! s’emporta Soren qui ne supportait pas qu’elle se joue de lui. _ Je vous assure que je n’ai jamais eu vent de telles pratiques, et je connais mon père, jamais, il n’aurait exigé… _ Vous devriez vous en aller avant de me faire perdre patience, la coupa le souverain agacé. _ Sire… si mon père s’est comporté de manière répréhensible comme vous dites, alors vous savez ce que cela fait… montrez-vous magnanime, montrez que vous n’êtes pas comme lui. C’est ainsi que vous gagnerez le cœur de cette nation. Le comportement de la reine lui chauffait le sang. De l’entendre faire mine que son père n’avait rien fait de répréhensible, tandis que lui, il serait le plus vil des hommes, lui donnait envie de dissoudre son mariage et d’agir comme il se l’était prescrits au début de cette guerre. _ Je vous promets mon soutien total…, continua sa femme avec des yeux suppliants, je ferais en sorte que… _ Vous dites que vous me soutiendrez, ma chère, alors que vous vous défilez pour le minimum attendu d’une reine… _ Je ne vous suis pas, j’ai consenti à vous prendre pour époux et à... _ A vous pavanez à mon bras ! finit Soren à sa place. Seulement, ce n’est pas ce qui fera asseoir mon autorité. Izia garda le silence un instant, elle tentait de comprendre ce qui était attendu d’elle. _ Alors que dois-je faire ? demanda la jeune femme aux abois. _ Comportez-vous en reine digne de ce nom, et donnez-moi un héritier...
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