Passe la nuit avec moi...

1203 Mots
Passe la nuit avec moi Ce soir-là, ce fut le pire des soirs de toute la vie de Faith. Elle venait de renvoyer son dîner sans y avoir touché et même les gestes les plus banales lui parurent insurmontables. Elle avait l’impression qu’un sort l’avait figé, tandis que ses pensées, elles, étaient devenues invasives et incontrôlables. « Maudite c***n ! Pesta-t-elle tandis qu’elle réalisait que tout ce qu’elle avait fait, avait été vain. » Pourtant, elle s’était donnée tant de mal pour en finir avec la grossesse de cette ribaude et voilà qu’elle apprenait qu’elle avait été soignée à temps. Et que son bébé et elle allaient bien. _ Madame, vous devriez sortir du bain, l’eau est en train de refroidir, lui dit sa domestique tandis qu’elle restait prostrée dans sa grande baignoire, le cœur glacé par la situation. _ Qu’est-ce que ça peut te faire, grogna la princesse qui ne supportait plus rien. Va donc dormir, je n’ai plus besoin de toi ! _ Mais madame… _ Tu es sourde ? Va-t’en ! Voyant que sa maîtresse n’était pas d’humeur tendre, la domestique baissa la tête et s’exécuta sans insister. Faith s’allongea dans l’eau et s’obligea à réfléchir. Elle devait faire quelque chose ou sa vie dans ce palais deviendrait un enfer. Elle ne pouvait supporter l’idée que l’héritier du trône, soit l’enfant d’une autre. Si cela devait arriver, jamais, elle n’aurait de place réelle dans ce pays, ni dans le cœur de Helias, elle sera comme ces bibelots sans valeur que l’on met en vitrine pour décorer un temps. _ Non, c’est hors de question ! décida-t-elle en se redressant. Je ne deviendrai pas ce genre de femmes bafouées, si héritier, il doit y avoir, il sortira de mes entrailles ! Sans attendre, elle sortit de l’eau et s’enroula d’un linge. Elle enfila sa robe de nuit et se dirigea vers le miroir pour arranger un peu son allure. Après avoir passé une capeline au-dessus d’elle, elle sortit de sa chambre bien décidée à exiger ses droits auprès du roi. Alors qu’elle arrivait devant la porte de ce dernier, elle fut arrêtée par les gardes en charge de la surveillance. _ Je viens rendre visite au roi, déclara-t-elle sur un ton pincé et la tête haute. Veuillez vous écarter de mon chemin sur le champ ! _ Que madame nous pardonne, seulement, nous n’avons reçu aucune instruction en ce sens. _ Messieurs, vous semblez oublier que je suis son épouse, et aussi la future reine ! Si vous ne voulez pas vous exposer à mon courroux, écartez-vous de mon passage ! Après s’être consultés du regard, l’un des deux hommes alla frapper à la porte du souverain. _ La princesse de Saragon est là, elle exige de voir sa Majesté, fit le garde à Cocin après qu’il lui a ouvert la porte. _ Sa Majesté est occupée ce soir, dites à la princesse, que l’on transmettra sa demande d’audience… Le valet n’avait pas fini de parler que Faith dépassa le garde resté près d’elle, et vint à sa rencontre. _ Comment osez-vous me renvoyez comme si je n’étais rien ! gronda la jeune femme avec colère. Vous oubliez qui je suis ?! Je suis la femme de votre souverain et en tant que telle, je suis légitime à venir à tout moment ! Tout en disant cela, elle poussa Cocin et entra dans les appartements royaux. _ Madame… vous…. Vous ne pouvez pas entrer ! bredouilla le valet prit au dépourvu, puis au garde qui ne savait comment réagir, qu’attendez-vous ? Arrêtez-la ! En entendant cet ordre, Faith accourut jusqu’aux portes de la chambre royale et les ouvrit avec empressement. Elle qui était venue confronter le roi sur son manque d’intérêt pour elle, et tenter de lui soutirer une nuit d’amour, se retrouva sans voix devant la scène qu’elle avait devant les yeux… *** Anisha comprenait les craintes que nourrissait l’ambassadeur et Helias, pourtant elle préférait encore la confrontation avec cet émissaire de Raman plutôt que de rester à Montéry. En s’imaginant le mariage de l’homme qu’elle aimait avec une autre, elle perdait déjà pied, alors y assister, c’était juste impensable. _ Je suis désolée, fit Anisha en tournant le dos au souverain et en soupirant de ne pas pouvoir s’épancher plus sur ce qu’elle ressentait, mais je veux tout de même partir. Et le plus vite sera le mieux… _ Mais enfin, tu as écouté ce que je t’ai dit à propos de cet homme ? _ J’ai entendu en effet, mais comme je vous l’ai expliqué, je n’ai pas d’informations à lui donner sur ma mère, et s’il ne peut rien obtenir de moi, il s’en ira comme il est venu. _ Tu te méprends sur ce dernier point. Cet inquisiteur n’est pas du genre à croire les gens sur parole, et ce n’est qu’en les suppliciant qu’il s’assurera de tes dires… s’il s’en satisfait. _ Quitte à choisir entre le supplice du corps et celui du cœur, je préfère encore le premier. Mais merci de vous inquiéter de moi, Sire… Tandis qu’elle voulut s’en aller sans se retourner, les bras de Helias s’enroulèrent autour de ses épaules pour l’arrêter. Prise au dépourvu, elle voulut protester, mais il la serra tout contre lui. Son corps était peut-être d’acier, mais sa chaleur était toujours aussi réconfortante. Et surtout si évocatrice… _ Sire… _ S’il te plaît, soupira son ancien amant, reste avec moi, juste cette nuit… après cela, je te laisserai libre de faire ce que bon te semble. Anisha écarquilla les yeux devant cette demande directe et sans même qu’elle ne puisse le contrôler, ses veines s’embrasèrent et son souffle se raccourci. _ Majesté… _ Je sais bien que c’est loin d’être raisonnable, ou comme il faut, mais mon cœur ne peut se résoudre à cette séparation. Et en passant un dernier moment ensemble, il lui restera un souvenir merveilleux qu’il pourra chérir jusqu’à son dernier battement… Les émotions de la jeune femme étaient déjà à fleur de peau et d’entendre ces mots, les larmes lui montèrent aux yeux. Elle aussi aurait voulu avoir un moment à chérir, un souvenir auquel elle aurait pu se raccrocher dans les moments de solitude ou de difficultés. _ Mon amour, continua Helias d’une voix empreinte de peine, si c’est une demande qui te répugne, on peut juste passer la nuit l’un prêt de l’autre, ma satisfaction sera tout aussi gran… Ne contrôlant plus la déferlante d’émotion qui traversait son corps, Anisha se retourna et noua ses mains autour du cou du souverain, le forçant à se pencher sur elle. _ Anisha, murmura Helias incrédule. Tu es sûre de toi ? Pour toute réponse, elle se hissa sur la pointe des pieds et apposa ses lèvres contre celles de son bien-aimé. Il y en avait eu des baisers enflammés entre eux, mais celui-là avait un goût particulier. Anisha n’aurait su l’expliquer, mais c’était, et de loin, le plus extraordinaire de tous. D’une douceur infinie, il témoignait de toute la tendresse et de l’amour sincère que leurs âmes se portaient. Et alors que Helias l’enserra plus fort contre lui et qu’il approfondit leur échange, un bruit de porte que l’on ouvre, la fit sursauter.
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