Suis-Je Un Monstre?

860 Words
« Les filles... ». Je murmurai. « Je ne suis pas vraiment en colère. » Je déboutonnai ma chemise et laissai apercevoir mon débardeur blanc. « C'est juste que moi non plus, je ne comprends cette attitude que tu as depuis ce matin, Olaf. » Je levai le regard sans pour autant défier les leurs. Les lèvres d'Esméralda étaient pointées vers le bas et Ami avait la tête penchée sur moi. « J'ai simplement eu mal que tu te moques de ma lecture alors que c'est mon échappatoire dans la vie. Tu le sais très bien. » Une larme serpenta ma joue droite. Ami se redressa tout en gardant sa main dans celle d'Esméralda pendant que je poursuivais. « Je ne comprends pas quel était ton objectif en parlant de mes livres. » Ma voix se resserrait. « J'ai eu l'impression que tu m'insultais, que tu voulais me dire que ma vie ne serait jamais mieux. Pourquoi vous me faites sentir que je suis la méchante là où j'ai craqué parce que justement », mon index frappait ma poitrine, « je me suis sentie jugée. Quel est donc le rapport entre le fait que j'étudie et ta vie amoureuse ou encore le fait que tu vas partir pour l'étranger ? Tu pouvais très bien venir te confier à moi sans cette remarque dénigrante. » Mes yeux fixèrent de nouveau son pendentif, et je me souvins du jour où elle l'avait glissé sur mon cou. Il était si léger et nuançait parfaitement mon teint, que je m'imaginai dans les rues du Vietnam à commander de la Street Food, comme Esméralda appelait les commerçants de rues. La salle tournoya lentement autour de moi et j'en eus le vertige. Je lançai, « oh que ça doit être dur d'avoir assez d'argent pour s'offrir de visiter les plus beaux pays du monde. » Des veines se dessinaient sur les côtés de mon visage. Mes yeux étaient rouges et ma voix cassée. Ce n'était pas à elle que j'en voulais. C'était à la vie. Mon corps s'écrasa mollement sur le siège. Olaf et moi échangions un regard insistant et désappointé. Dans le blanc de nos yeux, des vérités que nous avions peur de verbaliser tonnaient et omettaient des couleurs fortes. Avec féminité, contenance et classe ; tout ce que je n'étais pas, elle bouscula une mèche sur le côté droit de sa tête. Elle tenta de s'expliquer malgré mes accusations. « J'ai l'impression que tu m'aimes et me détestes en même temps, Jo. Contrairement à ce que tu crois, ça me fait mal de vous laisser. Vous me donnez une impression de stabilité dans ma vie. J'ai peur de sortir de ma zone de confort. Que vais-je faire de la relation que j'ai passé deux ans à construire ? Je n'essayai pas de t'insulter plus tôt. Je voulais simplement te faire comprendre que si tu te perds trop dans ses histoires, la réalité te rattrapera et sera plus dure à vivre pour toi. » Elle toussota pour s'éclairer la voix. « Depuis quelque temps, je me demande si notre amitié et ma relation avec Charles pourra tenir la distance. » Je fixai le sol et espérai qu'il s'ouvre sous mes pieds. Ses paroles pouvaient par moment être sans émotions, mais derrière, ce n'était qu'une amie en souffrance. Ma voix tremblait. J'avais l'air stupide, égoïste et sans cœur maintenant. Olaf leva le menton vers le plafond et aux extrémités de ses yeux des eaux scintillaient. J'entendis, « oh mon cœur... » Venant d'Aminata qui marqua sa position. « Je sais que tu aimes ton mec. Je sais aussi que tu nous aimes beaucoup. Sinon, au lieu de traîner avec nous, tu traînerais avec les autres. Jean-Charles passe même plus de temps avec tes autres amis que toi-même. » Elles se regardaient avec compassion. Ami inspira avec force, força les yeux pour inspirer, et murmura. « Nous sommes toutes les deux dans le même bateau. » Des flèches de son désespoir me traversèrent l'âme, me crispant la jambe. Un sourire réconfortant sur la face, Esméralda répondait, « je sais, Ami. Merci... décidément, cette année sera lourde pour toutes tes deux. » Elles avaient l'air loin de moi. Que me cachaient-elles et depuis quand se rejoignaient-elles autant ? Je n'étais pas la méchante de l'histoire. Je ne voulais pas non plus qu'Ami le pense alors, je posai ma main sur l'épaule d'Esméralda, prête à faire la paix. « Écoutes... toi et moi, nous nous sommes peut-être mal comprises et je m'en excuse. Mais pourquoi n'essaies-tu pas d'en parler avec tes parents ? Ils ont l'air d'être plus ouverts que les nôtres. » Leurs mains se séparèrent lentement. Pendant qu'Olaf me fixait, Ami tournait de nouveau ses yeux vers le vide. Elle caressait de manière gênante son bras, poussait son corps et s'éloignait du mien. Je ne comprenais rien du cours des événements. Et dans l'œil d'Esméralda, je le vis encore. Cette angoisse et peur qu'elle avait au début de cette conversation. Sa poitrine vibrait à haute fréquence et se voyait au travers de son vêtement. À l'intérieur probablement s'affolaient des mots qu'elle hésitait de dire devant moi.
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