De mon observatoire, j'arrive à distinguer une partie du pont en piteux état; l'état même de la rambarde signifiant qu'une voiture avait dû faire un saut dans l'étendue d'eau et des plongeurs descendant dans le fleuve.
Les minutes passent sans que je ne constate leur retour.
Mes jambes ne me supportent plus et je m'écroule au sol.
"J'ai échoué. J'ai échoué. "
Je me passe la main sur le visage.
"Est-ce un coup du sort? Pourquoi maintenant? Pourquoi au moment où je pensais avoir de la chance d'y arriver sans faute, tout s'est compliqué? "
- IL L'ONT RETROUVÉ. cris une voix.
Instantanément, je me lève. Il me faut découvrir qui c'est et savoir s'il est vivant ou mort.
Sur ces pensées, je me rapproche plus discrètement .
Soudain, une main se pose sur mon épaule, me faisant sursauter.
- Qu'est-ce que tu fais ici, toi? Tu ne sais pas que c'est interdit?
Je me retourne pour me trouver devant un flic au ventre rebondi. Il me toise sévèrement.
- Euh... Pardon Monsieur mais, j'ai cru que...
- Que rien du tout. Allez. Dégage de ma vue.
- S'il vous plaît Monsieur. Je veux savoir si la personne est au moins vivante.
Il hausse un sourcil.
- Et pourquoi veux tu le savoir? As tu quelque chose à nous révéler? me demande t-il, soupçonneux.
- Non. Non. C'était juste par curiosité.
- Hum...
Il lance un regard derrière moi, fait un signe de la main puis hoche la tête. J'entends du bruit dans mon dos, ce qui me fait changer de champs de vision.
Vu que je suis près de l'ambulance, je peux voir le tissu blanc recouvrant ce qui doit être un corps, transporté sur une civière et remonté dans le véhicule.
Mon téléphone sonne mais je n'y prête pas attention.
"La personne peut bien attendre."
- Bon. Il est mort.
- Il?
- Ouais. C'est un gars. Sûrement un autre qui conduisait en était d'ébriété. Bref. Ta curiosité a été satisfaite. Hors de ma vue maintenant où je t'embarque, compris?
Il me pousse et je n'ai d'autre choix que de déguerpir. Je n'ai pas pu savoir qui s'était.
On essaie encore de me joindre et je décroche.
- Allô ! Qui est-ce ?
- C'est Allena. Tu ne reconnais plus mon numéro?
- Il est mort.
Un silence s'installe automatiquement.
- Oh! Est-ce que ça va?
"Elle se fout de ma gueule en me posant cette question?"
- Désolée. C'est une question stupide. Tu veux que je vienne? J'en ai déjà terminé avec mes cours de la journée...
- Non. Je veux être seul, s'il te plait. À plus.
Je raccroche et me traîne jusqu'à la maison. Je marche sans savoir où je vais exactement et ne sais même pas par quel magie je suis revenu à New-key.
Quand je franchis le grand portail, il fait déjà nuit noire et le bruit d'une fête d'ado me parvient depuis quelques pâtée de maisons.
"Il doit être assez tard."
L'écran de mon portable me le confirme en affichant vingt trois heures.
Mes yeux s'ouvrent en grand lorsque, détachant mon regard de l'heure, je remarque que les lumières sont allumées. Je cligne plusieurs fois des yeux pour vérifier que je ne rêve pas.
" Seraient-ce des voleurs? "
Je secoue la tête.
"Non. Il est trop tôt. Est-ce alors le psychopathe qui m'attend gentiment dans mon salon?"
À cette dernière hypothèse, je me dirige vers le garage et saisie le premier outil; une barre de fer.
Lentement, je m'approche de la porte et tends l'oreille.
"Il n'y a aucun bruit. "
J'ouvre alors avec discrétion et m'engouffre dans la pièce.
J'inspecte les lieux du regard et reste choqué par le spectacle que j'ai sous les yeux.
Je laisse tomber mon arme sans savoir si je dois soupirer de soulagement ou grogner d'amertume.
*La réunion familiale
Assis tous les deux dans le sofa, Cid et Myriam Adiaffi ou devrais je dire mes parents, ont des regards interrogateurs posés sur moi.
"Qu'est-ce que vous faites là, vous?"
Ma colère renaît et je dois prendre sur moi pour ne pas leur gueuler dessus.
La bouche de ma génitrice bouge mais je n'entends rien sortir de sa bouche. Une petite inspection et je vois qu'elle a vieilli depuis la dernière fois.
Je ferme alors la porte sans délicatesse et me rue vers ma chambre sans leur accorder plus d'attention.
"Je n'ai aucune envie de voir leurs faces et encore moins de leur adresser la parole. Ils sont à la maison; tant mieux pour eux. "
- ANANI.
La voix grave de Cid se répend dans la maison.
Je souffle, m'arrête et me tourne vers le couple.
Je les scrute avec un air défi.
" Ils ont vieilli, je trouve."
— Bonsoir. Comment allez-vous? Bien, je suppose. dis-je en prenant mon ton le plus insolent.
Je vois le regard de ma mère se voiler d'une sorte de tristesse, mais que je considère plus comme des remords et de la culpabilité bien mérités, tandis que mon père, lui fronce les sourcils. Il semble assez énervé et je n'en ai cure.
— Où étais-tu?
Je ris jaune. Sa question, selon moi, n'a pas lieu d'être. Je lui sers donc la première phrase qui s'insurge dans ma tête.
— Qu'est-ce que ça peut te faire de le savoir, hein?
Je fais quelques pas vers lui et l'affronte du regard.
— De quoi je me mêle, Papa, dis-je en détachant les syllabes du dernier mot.
— Viens t'asseoir, s'il te plaît, me dit ma mère d'un ton suppliant. Nous avons à parler.
— Non, merci. Et désolé, mais ce que vous avez à me dire ne m'intéresse pas. Bonne nuit.
J'allais rejoindre ma chambre quand la main ferme de mon père agrippe mon épaule et me fait pivoter. En une seconde, je me retrouve assis sur l'un des sièges.
— Tu vas rester et nous écouter. Compris?
La voix ferme de l'homme me dissuade de bouger. Cependant, je me relève sans pour autant quitter la pièce.
Je préfère rester debout et me barrer si la discussion devient trop barbante.
Je vous écoute. dis-je en un soupir.
À ma grande surprise, c'est ma mère qui commence.
— Nous... Nous avons appris que tu avais séché plusieurs cours et... Et aussi que tu es alcoolique.
Je hausse un sourcil, me demandant s'il s'agit d'une blague.
"Depuis quand sont ils au courant de ce que je fais ?"
— Ouais. Et? Quel est ton problème ? Je fais ce que je veux, non ?
— ANANI ! Comment peux-tu te permettre de parler ainsi à ta mère ? Est ce comme cela que nous t'avons élevé ? Ce doit être tes mauvaises fréquentations. On aurait dû mieux te surveiller. Ces gens-là ne veulent pas ton bien, mais juste que tu gâches ton avenir comme eux.
La colère coule dans mes veines comme de l'acide. Je n'arrive plus à me retenir.
Je laisse échapper un rire sans joie avant de lui balancer tout ce que je veux au visage ; tout ce que j'ai retenu en moi et qui n'a qu'une envie, celle de sortir d'entre mes lèvres et de déverser l'ensemble de son venin.
Je hurle presque.
— TU T'ENTENDS PARLER LÀ ? "M'élever"? Je ne savais pas que vous connaissiez ce mot. Vraiment pas. Elle et toi ne m'avez pas élevé. C'est une illusion que vous vous êtes forgés. Vous m'avez abandonné. Dans ma vie, dans mon monde, vous êtes morts depuis bien longtemps et je me considère comme étant seul.
Tu parles de mauvaises fréquentations. Tu crois que j'ai des amis qui me poussent à boire, c'est ça ? Tu ne t'ais jamais dit que le problème vient peut-être de vous ? Si tu veux tout savoir, c'est grâce à vous deux que je bois. OUI. GRÂCE À VOUS. ALORS, ARRÊTEZ DE TROUVER DES BOUCS ÉMISSAIRES.
Je leur fixe chacun leur tour avant de conclure.
— Vous n'êtes que des ombres et les ombres, on n'y fait pas attention.
Je les plante là et me dirige vers la porte d'entrer, mais celle-ci est fermée.
" Quand l'ont-ils verrouillée ?"
Je sais que je ne peux pas sortir alors, je me rue vers ma chambre. Mon père m'appelle, mais je l'ignore.
Je me retrouve dans ma pièce favorite, allume la lampe et, hors de moi, je saccage tout. Je balance tout ce qui me tombe sous la main. Tout le contenu de mon bureau fait le tour de l'habitacle, les couvertures, oreillers, vêtements et autres subissent le même sort.
"J'en ai marre. Pour qui se prennent-ils ?"
Des coups sont donnés à la porte et j'entends crier mon nom, mais n'en accorde aucune importance. Je dois me défouler. Le c*****e continue jusqu'à ce que je me sente épuisé.
Je m'écroule sur le sol, fatigué, les larmes pleins les yeux.
"Je veux qu'ils disparaissent de ma vie. Ils n'ont rien à faire."
Pour oublier ce désagréable moment, je décide d'aller chercher quelques bouteilles que je pourrai descendre et me calmer un peu.
Je fouille sous mon bureau, enlève la planche qui donne sur un double fond et en sort ce que je voulais.
L'alcool coule le long de mon œsophage de façon incontrôlée, à tel point que mon haut en est taché, voir presque mouillé. Je n'y fais aucunement attention.
Peu à peu, je sombre dans le noir, apaisé.