Le lendemain, je suis réveillée par des coups sur ma porte. Je suis confuse car ni Fred, ni mon père ne se donne la peine de frapper avant d'entrer dans ma chambre. Les coups étaient légers presque inaudible. J'en viens à me dire que j'ai sûrement imaginé le bruit que j'ai entendu. Puis, pour une seconde fois, je perçois des coups sur ma porte, mais plus fort cette fois. Cela ne fait aucun doute, il y a bel et bien une personne devant ma chambre. Puis une voix masculine s'élève dans l'air pour atteindre mes oreilles. Une très belle voix, même.
"Mademoiselle, je suis Drake, votre nouvel aide." Commence-t-il. "Puis-je entrer?"
"Oui. Entrez." Je lui réponds.
Je me redresse légèrement sur mes coudes pour pouvoir observer la porte plus facilement. Je suis curieuse de voir quel physique peut bien accompagner une si belle voix. Lorsque la porte s'ouvre, je ne suis absolument pas déçue par la vision qui s'offre à moi. Son apparence est tout à fait à la hauteur de sa voix. Si c'est ce type mon nouvel aide, je vais pour la première fois de ma vie être reconnaissante d'avoir eu cet accident. J'en oublie presque mon nom. Grand, il mesure, à vue de nez, près de six pieds, peut-être plus. C'est une véritable montagne de muscle qui vient d'entrer dans ma chambre. Il a les cheveux longs et noirs qu'il a noué en un chignon derrière sa tête. Ses yeux, d'un magnifique gris argenté, sont réellement captivant. J'ai presque envie de m'y noyer. Une cicatrice travers sont front en diagonal, juste au dessus de son oeil gauche. Une mâchoire carré, rasé de près. Je peux dire qu'il est le deuxième plus bel homme que j'ai pu croiser, sans exagération.
"Avez-vous besoin d'assistance pour sortir de votre lit?" S'informe le dénommé Drake dès qu'il est devant moi.
"Pas si tu viens m'y rejoindre." Je dis avant même de réaliser les mots qui sortent de ma bouche. Je suis mortifiée. Je regrette immédiatement mes propos. Cela ne me ressemble pas de dire de telle chose. Je suis la première étonnée que cela se soit produit.
"Charmante invitation, mais vos parents ne me paie pas pour prendre du bon temps." Rétorque Drake, un sourire moqueur au coin de ses lèvres.
Je me sens extrêmement gênée. Je voudrais pouvoir m'enfuir et me cacher ailleurs, jusqu'à ce que j'oublie que j'ai pu un jour dire une telle chose à un parfait inconnu. Cependant, c'est impossible et ma gêne atteint un nouveau degré lorsqu'il se penche pour me prendre dans ses bras pour me déposer dans ma chaise. Mon visage est si près du sien que je peux sentir son après rasage une odeur de menthe poivrée. J'ai envie de mourir lorsqu'un soupir de contentement m'échappe car je trouve qu'il sent très bon et que c'est une odeur que j'aime beaucoup, à la base. Je suis rouge comme une pivoine quand Drake me dépose dans mon fauteuil. Il s'éclipse aussitôt que mes fesses touchent le cuir de ma chaise. Je ne comprends pas ce qu'il se passe avec moi et je commence à me dire que la cohabitation avec lui va devenir pénible si je n'ai aucun contrôle sur moi lorsque je me retrouve avec mon nouvel aide. J'en viens à me demande s'il est trop tard pour tenter de convaincre mes parents de rester à la maison.
Je prends mon temps pour choisir mes vêtements. Je prends la peine de vérifier chaque morceau attentivement. Je pèse ensuite le pour et le contre de chacune des pièces de vêtements qui m'attire un peu plus que les autres. Bref, une chose qu'il me faut ordinairement dix minute à faire m'en prend le triple. Malheureusement, il me faut sortir de ma chambre passer ce délai, car j'ai une envie pressante qui se fait sentir. Cependant, je me refuse à demander de l'aide à Drake, pas après ma récente humiliation.
L'exercice fût un peu plus compliqué que je le pensais. Je croyais pouvoir m'installer sur le côté de la toilette, verrouiller mon fauteuil, puis glisser du mieux que je le pouvais jusque sur le siège de la cuvette. Dans ma démarche, j'ai oubliée une chose très importante. J'ai omis de compter les accoudoirs de mon fauteuil, dans l'équation. Je réussi à peine à lever mes fesses de ce fauteuil par moi-même, alors me hisser hors de ma chaise en devant me soulever au-dessus de ces accoudoirs, ça relève de la science-fiction. Soit je trouve une autre idée, soit je demande à Drake son aide et je m'humilie davantage car je sais que je vais dire ou faire quelque chose de stupide. Je le pressens. Je ne suis tout simplement pas moi-même, lorsqu'il est devant moi et mon cerveau se fait la malle.
Mon envie me force, par contre, à voir la réalité en face. Si je ne lui demandes pas son aide dans la minute qui vient, il y a de forte chance pour que je m'urine dessus. Mon orgueil me perdra si je m'entête. Découragée, je soupire puis je roule vers la porte pour l'entrebâiller.
"Drake, j'ai besoin d'aide." Je dis avec un ton piteux, malgré moi. "Ça urge!" Je m'exclame ensuite.
Drake ne me répond pas, mais j'entends le bruit de pas qui se rapproche. Je suis heureuse de constater que je n'ai pas héritée d'un autre Justin. Si c'était lui qui s'occupait toujours de moi, je crois que je serais toujours dans mon lit et qu'il finirait par devoir nettoyer mes draps, car il traîne trop. Drake arrive vite auprès de moi et lorsqu'il voit dans quelle pièce je me trouve, il ne pose pas de question. Il me ramène près de la cuvette, me soulève en me tenant sous les bras, sans hésiter. Il a la politesse de regarder ailleurs lorsqu'il entend que je déboutonne mon jeans. Il m'installe, puis il repart sans me regarder. Je soupire de soulagement dès qu'il referme la porte.
"J'ai terminée." Je l'informe, quelques minutes plus tard, une fois que j'ai remontée mon pantalon.
"Un instant." Je l'entends crier. Cela semble provenir de la cuisine. Je perçois très bien le bruit du ventilateur de la hotte du poêle. J'en déduis qu'il cuisine, probablement.
Je n'ai pas à attendre une éternité, par contre. Deux minutes plus tard, il est de retour, auprès de moi. Dès que je suis installée dans ma chaise, il m'entraîne vers la cuisine. Il va jusqu'à la table de la salle à manger et il me laisse devant une assiette contenant un petit déjeuner copieux. Deux oeufs, un peu de bacon, deux saucisses et une tranche de jambon. Le tout accompagné de fèves au lard au sirop d'érable, de deux rôties, d'un café et d'une assiette de petits fruits. J'en suis bouche bée et je reste un instant à fixer toute la nourriture qui se trouve devant moi. Drake revient avec une seconde assiette et il s'installe à ma gauche.
"Est-ce que tu es réel ou je dors toujours?" Je dis, encore une fois sans réfléchir et réalisant mes paroles après coup. Il éclate de rire. À ce rythme, d'ici le retour de mes parents, ce type va penser que je suis complètement débile.
Je n'attends pas sa réponse et je dévore mon repas. Je m'éclipse aussitôt que j'ai terminée. Avant de dire autre chose de stupide spontanément.
Je me rends donc à l'armurerie de mes parents. Si je ne peux pas travailler, j'ai bien l'intention de faire quelque chose d'utile, tout de même. Je prends des couteaux de lancer dans leur étui et quand je constate que mes parents n'ont pas apporté l'arc à poulie, je l'as saisi ainsi que le carquois plein de flèches. Je sors de la pièce, passe devant ma chambre, celle de Fred puis la salle de bain. Dès que je débouche dans la cuisine, je vois Drake qui s'avance avec les assiettes vides dans les mains. Il s'arrête net et me lance un drôle de regard quand il remarque les armes que je traînes sur moi. Il semble attendre que je lui dise ce que je compte faire avec ça, sans pour autant me le demander directement.
"Merci pour le déjeuner. C'était délicieux." Je lui dis, en me rappelant que je ne l'ai pas remercié pour le repas. Il s'est donné la peine de cuisiner, c'est la moindre des choses de lui dire que j'apprécie.
"C'est naturel, il n'y a pas de quoi me remercier." Je l'entends me dire, alors que j'ai déjà tournée sur ma droite et que j'ai presque atteint la porte donnant accès à la terrasse arrière.
Je ne perds pas de temps pour descendre la rampe d'accès sur ma droite, dès que je franchi la porte. Je vais ensuite me placer face au petit boisé que nous avons dans notre cour arrière. Je verrouille mes roues pour être plus stable et je dépose ensuite l'arc et le carquois debout, appuyés sur mon fauteuil. Je prends ensuite la ceinture de cuir contenant les couteaux et je les retire.
Je passe une bonne partie de ma matinée et de mon après-midi à m'entraîner. Je prends pour cible l'arbre le plus près de moi. Celui-ci est à une dizaine de mètres, environ. Dès que j'ai lancée tous les couteaux, c'est le tour de l'arc. Je n'arrête pas tant que je n'ai pas vider le carquois. Puis je vais tout récupérer avant de revenir à mon point de départ et je recommence. Mes parents seraient sur le point de faire une crise de nerfs s'ils savaient. C'est une chose, pour eux, que j'utilise les couteaux, en cas de danger, pour me défendre, mais c'est autre chose d'utiliser d'autres armes pour m'entraîner. Ils ignorent que je sais très bien manier la plupart des armes qu'ils possèdent dans leur armurerie. Pour eux, manier les couteaux ne demande pas de réel aptitude. C'est pour cette raison qu'ils me permettent d'y toucher. Les autres armes, par contre, me sont complétement interdite. Comme je suis seule, presque toujours, je me suis dit que ce qu'ils ignoraient, ne pouvait pas leur faire de tort. Donc, je m'entraîne comme ceci, uniquement lorsqu'ils ne sont pas à la maison.
Quand, finalement, je me décide à entrer à l'intérieur, car je juge que je me suis suffisamment entrainée, mais principalement parce que je meurs de faim, je ne vois Drake nulle part dans la maison. Une fois les armes rangées, je l'ai cherché partout. Je me demande s'il n'a pas décidé d'abandonner le navire lorsqu'il m'a vue avec ces armes. Si c'est le cas, je vais être dans de beaux draps. Je suis incapable de vivre totalement seule. J'ai besoin d'une personne avec moi pour m'aider. Je chasse rapidement ces pensées, par contre, car pour le moment, ce ne sont que des suppositions. Je n'ai aucune envie de paniquer inutilement a propos d'hypothèse non fondée et mon estomac me rappelle également que j'ai faim. Le téléphone m'empêche, cependant, de me rendre directement au frigo, lorsqu'il se met à sonner.
Je ne reconnais pas le numéro qui s'affiche. Je me dis que c'est peut-être mes parents qui appellent depuis une cabine ou d'un motel, alors je décroche. La ligne est mauvaise. Je peux le devenir avant même que mon interlocuteur ne fasse entendre sa voix. Il y a énormément d'interférence.
"Oui?" Je dis
"Hé! Petite, t'as rien envoyé aujourd'hui." Commence l'homme à l'autre bout de la ligne. C'est un des hommes dont le nom se trouve dans le faux répertoire que j'ai reçu de mes parents. Lequel, je serais incapable de le déterminer avec précision, tant la ligne est mauvaise. "Tout va bien? T'es pas malade, rassure moi." Poursuit-il.
"Plus la peine de poursuivre la mascarade. Je sais que personne ne vérifie mes pistes, que c'est un travail fictif, créé par mes parents." Je rétorque, beaucoup plus désagréable envers cet homme que je le voulais. Ce n'est pas sa faute si mon père et ma mère ont fait cela.
"Au début, ma petite. Seulement au départ." Précise-t-il.
"C'est supposé vouloir dire quoi, ça?"
"J'ai vérifié tes pistes, un jour que je m'ennuyais." M'avoue l'homme. Je ne sais pas si je dois le crois ou s'il continue à se moquer de moi, mais je décide de rester silencieuse pour entendre ce qu'il a à dire. Qui sait, cela vaut peut-être la peine que je ne l'ignore pas en lui fermant la ligne au nez. "Elles étaient toutes fondées. À chacun des endroits, tu avais raison. Donc, maintenant nous y allons dès que tu nous envoies une piste. Tu es l'une des meilleures que j'ai connu pour nous dégotter du travail. Petite, tu as un très bon instinct."
Je suis surprise par ce qu'il vient de m'apprendre. J'aimerais pouvoir le croire mais j'ai des doutes. Les paroles de mon père sont encore trop présente dans ma tête, pour que je sois naïve au point de le croire sur parole. C'est très dur de savoir si une personne ment quand elle n'est pas devant nous. Il semble honnête mais je ne peux pas en être certaine à cent pourcent.
"Écoute, petite. Ne jettes pas tout de suite notre répertoire." Dit-il ensuite. "Lorsque tu seras prête, nous serons tous là à t'attendre. Tu as permis à une b***e de vieux que l'on avait remiser de se sentir utile à nouveau. Nous vérifierons toujours ce que tu nous enverras." Finit il, avant de raccrocher.
Je vais devoir réfléchir sérieusement à tout cela, mais pour le moment je décide d'aller me chercher à manger au frigo. Je remarque qu'il y a une assiette enveloppée dans du papier d'aluminium, avec une note sur le dessus. Je l'atteins facilement car elle a été mise à ma portée. Dès que je lis la note, je me sens soulagée. Drake n'a pas abandonné le navire, il est simplement parti faire des course. Selon lui notre frigo et notre garde manger sont totalement vide. Je soulève le papier recouvrant l'assiette et je découvre qu'un spaghetti m'attend. J'en ai déjà l'eau à la bouche. Je retire complètement l'aluminium et je vais poser l'assiette dans le micro-ondes. J'engloutis mon repas dans un temps record. Par contre, je me dis que je vais devoir parler à Drake au sujet de la grosseur de ses portions. S'il continue comme cela, d'ici un mois, j'aurai pris une trentaine de livre. Il y a quatre fois la quantité de nourriture que j'ai l'habitude de manger dans les assiettes qu'il me prépare.
Je vais ensuite m'installer dans le salon pour regarder un peu la télévision en attendant que Drake ne revienne. Je me demande de quelle ville reliée aux Lames, il est originaire. Je ne l'ai jamais vu auparavant, à aucune des rencontres ou des fêtes organisées. Je suis certaine que s'il avait été présent je l'aurais remarqué. Je devrais peut-être demander à Ethan, il pourra peut-être me répondre et cela me donnera une raison pour lui parler et entendre sa voix. Pendant que je réfléchis pour savoir si je vais appeler ou non Ethan, je commence à chercher ce que je pourrais bien regarder dans la liste complète des films et des séries disponible avec notre câblodistributeur. Malheureusement, mon corps prend la décision pour moi, car je finis par m'endormir, la télécommande dans les mains, pendant que je fouille la liste.