II- La première

1384 Words
II-La première Debout sur mon Skate, je me dirige vers mon établissement. En cette période de l'année, le soleil se lève plus vite alors, il fait assez beau durant ce début de matinée ; ce dont je profite. Je dépasse les immenses maisons identiques à la mienne sans y jeter le moindre coup d'œil. Dans ce quartier résidentiel de New-key , il n'y a que des hypocrites, des hommes et des femmes qui ne jurent que par l'argent et des gosses pourris gâtés ; rien qui puisse m'intéresser pour une quelconque relation. En chemin, je repense à cet inconnu qui a appelé. Il connaît mon prénom, ce qui veut dire qu'il pourrait s'agir d'un de mes camarades qui auraient décidé de me faire une farce. "Que tu crois. Mec, t'es qu'une crotte de nez au milieu de la chaussée". Alors, la seule explication possible est qu'il s'agit d'une erreur. Point barre. "Cependant, c'était quoi cette affaire de devinette ou je ne sais pas quoi ? Il a balancé des mots à tout hasard. Dans quel but ?" Je secoue la tête pour me libérer de mes réflexions. Je fais tout un foin juste pour des stupidités dans le genre. Soit c'est une erreur, soit un plaisantin qui veut se jouer de mes nerfs. Dans tous les cas, j'ai bien d'autres soucis. Durant le trajet, une ambulance et un camion de pompier passent à toute vitesse. Je n'y fais pas attention. Il y a sûrement eu un accident sur la nationale. Comme d'habitude. Quelques minutes plus tard, je me trouve à destination. Le Léonard est un grand établissement privé regroupant les départements du primaire et du collège ; ce dernier est scindé en deux cycles dont j'en suis au second. Chaque département dispose de son enceinte et de son portail ; ce qui explique l'immensité des lieux. La route que je prends me conduit directement dans la zone du "collège cycle 2". Je me dirige vers le mur donnant sur le portail du lieu. Je suis perdu en voyant la foule de loin. Il y a un attroupement, ce qui m'étonne assez. "Qu'est-ce qui se passe ? Est-ce un accident ? " J'essaie de me rapprocher du mieux que je peux. — Restez à l'écart. dit quelqu'un. Je remarque que tout le monde a les yeux rivés sur le sommet du bâtiment principal. Je suis leurs regards et prends un temps pour comprendre la situation. Sur le toit, se trouve une fille figée à son bord, à quelques centimètres du vide. Un pompier lui parle, mais il semble qu'elle n'en a cure. Elle ne fixe que le néant en se rapprochant encore plus de la mort. — ELLE VA SAUTER. hurle le pompier. De là où je suis, je ne peux pas assister à la scène en totalité. Je crois que les autres en bas ont décidé d'étendre une sorte de tissu ou de matelas gonflable pour l'accueillir. Mais tout se passe vite, bien trop vite. La lycéenne saute et son corps heurte le sol dans un bruit assez perturbant. J'entends des cris. Mes tympans en sont bombardés. Je me demande ce que voient les élèves aux premiers rangs avant qu'un souffle s'échappe de mes lèvres. Je suis soulagé de ne pas être aux premières loges. Je suis loin et ça me rassure. Pourtant, je ne sais pas par quelle magie, je suis poussé en avant et me retrouve soudain à un mètre du corps. Ce dernier jonche le sol. Je prends conscience que son visage ne m'est pas inconnu. Je me rappelle alors l'avoir déjà rencontrée. Mais... Oui... Si je m'en souviens bien, c'était lors de la rentrée scolaire. Elle m'avait demandé le bureau du proviseur. Elle a été sympa avec moi ; la seule personne dans ces lieux à m'avoir remarquée et m'avoir adressé la parole ; une fille agréablement sociable et douce. Je l'avais aidé le jour-là et ne l'avais plus revue. A présent, elle est devant moi, allongée dans cette mare de sang, ses jolis cheveux bruns souillés par le liquide rouge qui lui coulait du crâne. Ses yeux vides sont rivés vers le ciel, comme si elle était en train de rêver. Le visage de cette fille va hanter mes pensées pour toujours. Je le sais. Je détourne le regard, la bile me montant à la gorge. J'ai envie de gerber. Les ambulanciers se hâtent en direction du corps tandis que moi, je fais de mon mieux pour quitter cet endroit. Il faut que je m'éloigne au plus vite. "Je n'y tiens plus". ~Dans la soirée~ Je suis assis sur mon lit depuis tout à l'heure à lire les publications sur le suicide de la brune ou plutôt de Raissa. " C'est un joli prénom". pensé je. Selon les dires, elle n'avait aucun problème apparent et tout le monde se demande pourquoi elle en était arrivée là. "Tout le monde a ses secrets. Le masque ne tombe jamais en public." Il y a des questions et des messages de soutien à la famille. L'image du corps de la jeune fille s'impose à mon esprit. Je soupire et jette mon téléphone sur le lit en me demandant pourquoi je lisais ces trucs. Je veux chasser ce que j'ai vu de ma tête. J'essaie de penser à la plage, au sable fin et au bruit des vagues. Après l'accident de ce matin, les cours avaient été suspendus jusqu'à la semaine prochaine. J'avais alors quitté au plus vite les lieux pour me retrouver sur la plage de Fairy afin d'évacuer mon trop-plein d'émotions. C'était la première fois que je voyais un corps sans que ce ne soit derrière un écran et j'aurais aimé qu'il ait été dans un meilleur état. Elle aurait juste pu s'injecter une dose mortelle de cocaïne ou autre, non ? Ce sang, ce regard, les membres dans des positions anormales ; mon cerveau était comme une bombe à retardement. Je m'étais rendu compte à quel point, la vie était éphémère. Me remémorant ces quelques minutes, je m'étais installé non loin du bar situé de l'autre côté de la rue et où je m'étais soulé hier. "On ne sait jamais". {Et de un. Je t'aurais prévenu} Je ne comprends pas. Le destinateur s'est il trompée ou, est ce que ce serait l'autre connard de ce matin ? Je me pose des questions sur cet individu. Finalement, je décide de couper court à toute réflexion, prends quelques bouteilles dans ma réserve personnelle et bois comme jamais. Vu que j'ai déjà dix-huit ans, il m'est possible de m'approvisionner autant que je le veux. C'est l'un des avantages d'être majeur. On a droit à ce qui est réservé aux adultes. Je fais descendre des litres d'alcool dans ma gorge sans me soucier de quoi que ce soit. Demain, je ne vais nul part alors autant en profiter. Mon esprit est embrumé petit à petit et je sombre dans le néant, oubliant mes soucis de cette journée. Un nouveau monde m'ouvre petit à petit ses portes. Je me sens si bien... Durant toute la semaine, je me suis saoulé comme jamais, tel un puit sans fond. Je ne pourrais même pas compter le nombre de bouteilles qui sont passées par ma bouche. Mes parents, selon moi, ne doivent pas être au courant de mon amour pour l'alcool. De toute façon, je ne pense pas qu'ils en feraient cas s'ils venaient, par magie, à s'en apercevoir, car je sais que Camilla ne dira rien –elle sait ce que je vis et comprend qu'elle ne doit pas se mêler de mes affaires– et se contentera juste d'observer. Mes géniteurs s'en fichent de moi. La seule personne qui me reste, c'est notre femme de ménage qui, elle au moins, se préoccupe un peu de ma situation. J'aurais aimé lui rendre cette affection, mais je m'en sens un peu incapable. Va savoir pourquoi. Je n'avais pas reçu de coup de fil étrange durant tous ces jours ; ce qui confirme qu'il ne s'agissait que de conneries émanant d'un abruti voulant juste s'amuser avec mes nerfs. Si seulement je savais qui s'était pour le lui faire payer. Je peux être violent quand je le veux alors, il vaut mieux ne pas me chercher. Bref, les jours ont défilé de façon monotone et je n'allais pas m'en plaindre.
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